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Les Canaries - Le Cap Vert

Notre route dans l'archipel des Canaries

canaries

La traversée de 960 miles depuis Les Açores vers les Canaries a été ponctuée de grains et de vents variables passant du Sud-est au Nord-est. Nous avons pu tester nos leurres de lignes de pêche car un marlin voilier d'un beau bleu électrique et une daurade coryphène se sont laissés tenter. Tous deux de belle taille, j'ai même rempli quelques bocaux de conserve.
     

Après 7 jours de navigation, par calme plat, nous approchons de l'île de Tenerife dont le point culminant, le Mont Teide, est à plus de 3700 mètres. Ce n'est qu'à 2,5 miles de l'île que le rideau de brume se déchire et que nous apercevons la cote nord de l'île. En contournant la pointe  Nord-est qui s'appelle Anaga, le vent s'accélère brutalement. Nous passons de 0 à un vent de Nord-est de 40 noeuds. C'est un effet local  dû au relief des îles. Nous longeons la côte vers la ville principale qui est Santa Cruz de Tenerife.

     

Vue d'avion de Tenerife

Côte Nord-est de Tenerife

On peut voir au premier plan la Playa de las Teresitas très renommée (mais artificielle) pour son sable blanc (venant tout droit du  Maroc par bateau) ; et au second plan la Darsena Pescera, au fond on aperçoit la ville de Santa Cruz.

     

Mont Teide

Mont Teide

Hauteur : 3715 m.



    

     Quelle différence de paysage entre cette île et les Açores. L'île, très montagneuse, est très aride, chaque souffle de vent soulève une poussière rouge. La déforestation et la culture intensive ont tellement modifié le climat que certaines îles sont devenues des déserts où les taux de précipitation sont très faibles. La principale ressource de l'archipel est le tourisme. Le secteur de la pêche a souffert de la réduction des quotas.

      Lors de notre passage il y a 17 ans avec Dalite, nous étions amarré à couple d'autres voiliers le long du quai dans la Darsena Pescera situé à 7 Kms au nord de la ville. Il régnait alors  une grande activité avec de nombreux bateaux de pêche, sardiniers, langoustiers, thoniers. L'eau du port recélait mille choses indéfinissables et peu ragoûtantes, les cordages étaient noirs de gasoil. Aujourd'hui, la quantité de bateaux de travail a fortement diminué, et à l'entrée de la darse une marina (Marina Tenerife) accueille les petits bateaux à moteur et les voiliers locaux, ainsi que quelques voiliers de passage. Nous avons pu glisser la coque de 15 m du Patago au milieu des petites unités. Il y a une autre marina (Marina de l'Atalntique) en centre-ville qui est en cours de finition. Les tarifs pratiqués par les deux marinas sont très similaires.

 

      Régulièrement des autobus, appelés "guaguas" (prononcer "ouahouah") passent sur la voie rapide longeant les bâtiments du port et nous transportent au centre-ville en 15 min. La ville de Santa Cruz est encore tournée vers le duty free et le centre est truffé de boutiques d'indiens vendant appareils photos, montres, bijoux. Nous trouvons un shipchandler bien achalandé. En France, Jean-François a équipé Patago d'une éolienne Air Marine achetée d'occasion. Les premiers essais furent catastrophiques. Malgré un montage sur silent-bloc, elle vibrait de toute son âme entraînant dans son élan le portique. Après moult démontages et réglages, il a renoncé attendant de trouver la solution. A Santa Cruz, il a eu l'idée de peser les pales et leur a trouvé à toutes un poids différent. Chez le shipchandler nous avons trouvé un jeu de trois pales soi-disant équilibrées. De retour au bateau, le poids variait entre 170g et 220g . Sur les 6 pales, il a sélectionné celles dont le poids se rapprochait le plus. Et maintenant cela fonctionne, nous constatons avec plaisir que les petits ampères viennent regonfler nos batteries.

 

      Après une semaine, nous quittons Tenerife pour Grande Canarie. Nous faisons escale au Nord-ouest de Grande Canarie dans le petit port de Sardina. Mouillage un peu rouleur et il faut mouiller très près de la plage pour trouver des fonds de 7 m. L'eau a l'avantage d'être claire et nous voyons notre ancre posée dans le fond.

Sardina à Grande Canarie

Village de Sardina

     On aperçoit dépassant des toits des maisons, les pales  d'éolienne géante. Les îles de Tenerife et Grande Canarie en sont truffées (nous ne sommes pas allés sur les autres îles cette année)

 

     Notre escale suivante est pour la ville de Las Palmas sur la côte nord-est de l'île. Nous sommes au mouillage devant la plage entre la marina et le club nautique, dans Puerto de La Luz.

Vue de la ville de Las Palmas Grande Canarie

Las Palmas : Vue de la marina et du port de commerce

     Commercialement, la ville est beaucoup plus diversifiée que Santa Cruz. Nous avons pu faire réparer l'inverseur du Patago qui présentait une fuite d'huile importante, et investi dans deux panneaux solaires de 75 W chacun. Jean-François les a installé sur le portique.

     Pour effectuer tous nos petits travaux, nous sommes allés prendre une place dans la marina pour une semaine. Chiclette, notre chat, était ravie de rendre visite aux autres bateaux, histoire de se dégourdir les pattes. Un matin, elle n'est pas revenue à bord, ce qui n'est pas dans ses habitudes. Pendant une semaine nous l'avons cherchée partout, mis des petites annonces sur tous les pontons, fait paraître une annonce dans le journal local. Rien. A vivre 15 ans en sa compagnie, on s'était habitué à elle. Nous étions bien tristes.

Nous sommes retournés au mouillage en se disant que, ne retrouvant pas le bateau au ponton, elle avait vraiment peu de chance de nous revoir. Pendant ce temps, après 5 jours de navigation, un voilier anglais parti de Las Palmas s'est aperçu de la présence d'un chat clandestin à son bord. Notre chat portant un collier avec le nom du bateau, le propriétaire n'a eu aucun mal à associer le chat avec  le voilier Patago dans la marina et a contacté la capitainerie de la marina de Las Palmas. Le voilier anglais était arrivé en Espagne et projetait de revenir aux Canaries avec des amis et notre chat a fait parti du voyage aller-retour Canaries - Espagne. Après de nombreux échanges au téléphone, nous avons récupéré notre chat amaigri, les poils emmêlés par le gasoil, bien contente de retrouver son domaine maritime et sa gamelle. Trop curieuse, elle s'était endormie dans un équipet et s'est retrouvée enfermée dans le bateau qui a quitté la marina aussitôt son moteur démarré. Il va sans dire que désormais elle hésite à mettre une patte à terre !!!

Chiclette bien amaigrie

Chiclette de retour

     Après ces péripéties félines, on a envie de bouger. Les alizés ne sont pas établis encore, et le vent souffle du Sud-est. Aussi les mouillages sur la côte de Grande Canarie ne nous tentent pas. Deux mois après notre arrivée, nous reprenons la route en direction du Cap Vert. Les dernières courses sont faites, le plein d'eau aussi, le chat est à bord, on peut y aller....

 

Notre route dans l'archipel du Cap Vert :

Parcours au Cap Vert

 

Drapeau du Cap Vert

 

Drapeau National du Cap Vert

 

     Nous sommes partis le 21 octobre ; la traversée de 970 miles a duré 6,5 jours entre Las Palmas et Ilha do Sal, Cap Vert. Le vent de Nord nord-est de force 5 à 6 nous a propulsé vers les îles à bonne allure, dans une mer très agitée venant de l'arrière accompagnée d'une courte  houle de Nord.

     Les premiers jours, nous parcourons 190 miles par jour avec la grand-voile arisée 1 ou 2 ris et le foc roulé en partie, selon les humeurs du vent. Nous avons pêché une bonite portion qui a terminé ses jours en papillote, et perdu de nombreux leurres, le nylon cassé net, poisson trop gros ???.

     Après trois jours de navigation, nous sommes presque vent arrière, le foc en déventant, fait un méchant tour autour de la drisse de spi restée amarrée sur le balcon avant. Résultat : un noeud solide et la voile qui présente des poches gonflées par le vent arrière de 25 à 30 noeuds. Le foc a commencé à se déchirer le long de la chute puis ce sont les laizes qui lâchent.

 

Foc déchiré

    Essayant de remonter au vent pour tenter d'affaler le foc, la voile claquant si fort fait trembler tout le gréement de façon bien inquiétante. Il valait mieux ne pas insister.  Nous avons navigué sous grand voile seule et notre moyenne s'en est ressentie. Nous avons attendu une accalmie qui s'est présentée deux jours plus tard. On affale le foc en essayant de ne pas aggraver son état, puis on a envoyé le génois léger sur l'étai largable et nous sommes repartis à 8/9 noeuds.

     De nombreux dauphins sont venus jouer avec Patago, quelle merveille de les voir jusqu'à venir frôler l'étrave de la queue. Nous avons croisé aussi une tortue dormant en surface.

     Au matin du 28 octobre nous apercevons l'île de Sal, située la plus à l'est de l'archipel. Cette île offre un paysage volcanique et désert. Sur la côte ouest, le village de Palmeira  est très coloré, beaucoup de maisons sont en construction.

 

Dans le village de Palmeira

Maison du village de Palmeira

   

      A Sal se trouve l'aéroport international ainsi qu'un bureau d'immigration où nous ferons notre entrée dans le territoire capverdien. Les transports collectifs sont des voitures à plateau ouvert à l'arrière (comme des pick-up) où sont fixés deux bancs de bois ou de métal. On les appelle les "aluguer" (qui veut dire "à louer" en portugais).

    Beaucoup de voiliers au mouillage dont de nombreux bateaux ventouse (en rénovation!!) La population de l'île est très gentille et arbore facilement le sourire au moindre "Bom dia". La langue officielle est le portugais, mais entre eux, les capverdiens parlent le "criolou". A Palmeira, pas besoin de "gardien d'annexe", les enfants ne jouent pas avec les dinghies restés à terre. Le vol n'est pas de mise dans cette île. La monnaie locale est l'escudo capverdien (1 € = 110 escudos CV en 2002)

     Le mouillage étant très venteux, nous allons jeter l'ancre dans la baie voisine "Mordeira" à 5 miles au sud. Elle se révèle très venteuse aussi mais l'ancre tient bien. La pêche au fusil est délicate car le vent lève de petites vagues qui troublent l'eau. Le capitaine tenace, ramènera tout de même quelques poissons.

 

     A 25 miles au sud de Sal se trouve l'île de Boa Vista, dont la position géographique sur notre carte est décalée de 2 miles à l'ouest. Aussi appelée le "Petit Sahara Capverdien", cette île de forme ronde très peu habitée, présente une succession de dunes de sable blanc et de rochers noirs hérissés. Le mouillage se trouve sur le versant ouest face au village Sal  Rei. La présence de 5 éoliennes près du village donne une indication de forts vents réguliers ! De plus le vent venant de l'île, transporte du sable ocre jaune qui vient recouvrir le pont du bateau et tous les cordages. Pourtant l'eau semble claire et la présence de langoustes a été confirmée par un voilier déjà au mouillage. Nos pêcheurs s'équiperont plusieurs jours de suite à la recherche du tapis de langoustes tant désiré. Ils ne le trouveront pas. Devant tant de dépit, nous levons l'ancre pour nous diriger vers Sao Nicolau, où parait-il le mouillage est calme.

 

     Mouillés devant le village de Tarrafal à Sao Nicolau ; effectivement le mouillage est abrité, seulement quelques fois de fortes rafales de Nord-est s'engouffrent entre les ravins tous proches et descendent secouer les voiliers à l'ancre mais le fond est de bonne tenue.

     Du bateau, nous pouvons voir de belles falaises rouges très arides descendant vers la mer. Le village concentré est en pleine expansion, de nombreuses maisons sont en cours de construction, quelques arbres rabougris sont disséminés parmi les maisons. En hauteur du village au pied des falaises, on aperçoit de curieuses constructions de pierre formant un cercle d'1,50 m environ. On nous expliquera que ce sont des parcs à cochons.

     Panneau original

     Beaucoup de maison n'ont pas l'eau courante, et ce sont les fillettes et les femmes qui vont s'approvisionner au puits du village, en transportant de gros seaux de 50 L pour les femmes et 20 L pour les fillettes. Ce panneau préconise d'y faire attention !!

      De nombreuses échoppes offrant les produits de base et quelques bars animent le village, nous trouverons même un local avec un ordinateur offrant une liaison internet. Sur une place, on trouve les recharges de camping gaz (il ne faut pas être regardant sur l'état des bouteilles qui sont repeintes) et le matin, il y a un marché de fruits et de légumes.

 

Jean-Marie     Il faut recourir aux services d'une jeune gardien d'annexe, pour 50 escudos CV par jour. Cela relève plutôt du principe car ces mêmes enfants vont à l'école et l'annexe se garde toute seule. Notre gardien attitré s'appelle Jean-Marie, âgé de 13 ans. Souvent il se fera disputer par les autres enfants car il ne va pas à l'école.

 

     




Plaine verdoyanteNous visitons l'intérieur de l'île en aluguer, en compagnie d'équipages d'autres voiliers. Quelle surprise de découvrir juste derrière ces falaises si sèches, une immense vallée fertile recouverte de champs de maïs, bananiers, manguiers. On verra de nombreux oiseaux et des papillons, des fleurs partout.





On trouve des eucalyptus et des sapins sur les flancs du point culminant de l'île, le Mont Gordo retenant ces nuages bénéfiques qui arrosent régulièrement la vallée.

Route bordée de champs et de bambous

  

Nous irons visiter l'ancien village de Preguiça qui fut longtemps la ville principale de l'île avant que de nombreuses attaques venues de la mer décident les habitants de s'installer dans la vallée à Vila da Ribeira Brava au centre de l'île.

 

   




Barque de pêcheNous visiterons la partie ouest de l'île vers Ribeira da Prata. La route longe un paysage de plus en plus verdoyant où paissent de nombreuses vaches et des chèvres. Nous arriverons au village haut en couleur Praia Branca, et on est surpris de voir le chauffeur de l'aluguer descendre de sa voiture pour ouvrir une barrière fermant la route.



Il nous explique que cela empêche les animaux d'entrer dans le village, apparemment il est plus rapide de clôturer le village que de cerner les champs ! Nous poursuivons la route qui prend de plus en plus l'allure d'un sentier jusqu'au village en bout de chemin Ribeira da Prata accroché à la montagne.


Maison du village Ribeira da PrataNotre chauffeur nous accompagne dans notre visite et nous fait découvrir les fameuses Rotchas Escribidas, des signes inscrits dans la roche représentant des lettres. Nous reconnaîtrons des I, des O et des U mais rien de bien concluant pour nous novices. En remontant la rivière à sec, on découvrira de nombreuses piscines pleines d'eau servant à irriguer les cultures à l'aide d'un système de petits canaux de pierre.

 

     Ce séjour d'une vingtaine de jours dans les îles du Cap Vert nous a beaucoup plu et nous avons pu apprécié ces trois îles différentes. Il y a un livre que nous avons lu et qui reflète bien toute l'ambiance du Cap Vert. C'est "Cap Vert" de Jean-Yves Loude.

      A conseiller à tous ceux qui veulent s'y rendre.